La Mafia sur la rue Mont-Royal….ben voyons donc!
Au printemps 2013, ce texte est paru dans le bulletin de la Société d’histoire du Plateau Mont-Royal. Comme seuls les membres ont accès au bulletin, j’ai pensé le republier ici
En 2013, on trouve que notre quartier est créatif et dynamique même s’il est parfois turbulent, mais dans les années 1970, on le trouvait encore bien calme et c’est rare que sa vie était bousculée. Bien sûr, il y a bien des p’tits malfaisants ici et là … mais la mafia !
Cette histoire de meurtre se déroule Avenue du Mont-Royal en mars 1972, en face de l’église, près de la rue Pontiac, au restaurant New Miss Mont-Royal. Sa grande annonce néon dit «mets chinois», mais on y trouve aussi le menu traditionnel du restaurant de quartier de cette époque : pizza, spaghetti, charcoal steak, etc.
Ce fait divers, en apparence des plus banal, ne l’est plus du tout lorsque, on prend connaissance du contexte abracadabrant entourant le déroulement de l’histoire. D’abord, il faut retourner en août 1955, en Italie, en Sicile, dans la ville de Cattolica Eraclea.
Guiseppe Spagnolo, un paysan avec une forte personnalité antifasciste et un féroce militant syndicaliste en faveur des droits des agriculteurs, s’oppose aux factions de Mussolini et de la mafia locale qui défendent les intérêts de la bourgeoisie sicilienne qui exploite les bonnes terres. Il dérange ! On trame donc son élimination ; ce qui est vite fait. Mais la nuit du meurtre, des carabinieri en patrouille dans le secteur remarquent trois hommes cagoulés qui fuient les lieux, dont un qui est désarçonné de son âne et qui abandonne sa monture en cavale. La police retrouve l’âne et par conséquent son propriétaire, Rosario Gurreri, que l’on interroge alors avec attention. Dans l’eau chaude, il finit par avouer qu’il n’a pas participé à l’assassinat, mais qu’il a prêté son âne à un dénommé Giacinto Arcuri. Celui-ci lui aurait avoué le lendemain du meurtre, avoir tué Spagnolo, en compagnie de deux complices Leonardo Cammalleri et Leonardo Salvo. La police se met aux trousses des trois compères, mais sans succès.
On dit que les complices auraient même été cachés par le curé, qui n’aimait pas beaucoup les communistes et qui prétendait que Spagnolo s’était suicidé ! La police avait dit qu’il avait reçu sept balles (il ne voulait vraisemblablement pas rater son coup) !! Ils s’enfuirent vers le Canada mais furent condamnés, in absentia, à la prison à perpétuité en Italie. Ils ne furent curieusement peu inquiétés ici. Gurreri, quant à lui, purgea 5 ans pour complicité et émigra au Canada à son tour en1962, avec les conséquences que l’on connaît maintenant.
La police montréalaise en découvrant, dans la cuisine de son restaurant, son corps lourdement amoché et arborant une grosse «balafre» sicilienne, ne fut pas longue à considérer le meurtre comme une vendetta des siciliens de Montréal, 18 ans plus tard. Il n’y a pas que la justice qui a le bras long.
Mais, quels sont les liens avec l’actualité du crime organisé montréalais de 2013? Simplement pour dire que l’instigateur présumé, à la base du complot de Cattolica Eraclea, était Antonino Manno ; grand-père de Vito Rizzuto. Quant à Leonardo Cammaleri, c’est son beau-père.
Aujourd’hui, le temps a passé. Les lieux sont maintenant occupés par la librairie L’Échange et si vous recherchez une bonne histoire policière, vous pourrez y dénicher MAFIA INC. d’André Cédilot et André Noël qui relate aussi ces faits.
Cette photo de 1961, nous montre l’Avenue du Mont-Royal à son époque de gloire. Les plus vieux se rappelleront l’immense panneau publicitaire vantant la saveur du ragoût de boulettes Cordon Bleu tout en nous donnant l’heure et la température. On ne pouvait pas le rater, en plein dans l’axe de la rue Saint-Hubert. Le Jean Coutu a remplacé le Dionne et ses timbres primes; mais le paysage architectural est demeuré relativement inchangé.
Mes souvenirs du café Banquet, au 2e étage rue Mont-Royal entre Papineau et Marquette
Avant 18h on y allait faire nos devoirs, devant un bon café c’était dans les années 50
Prendre une marche de Papineau à Saint-Hubert, sur Mont-Royal et aller retour. On en avait pour longtemps, dans les années 50-60.
Que de beaux magasins.
Tu revenais avec un sac.