Printemps 1942 – Saint-Exupéry donne une conférence sur le Plateau
Antoine de Saint-Exupéry, aviateur et écrivain
Décembre 1940, à cette époque où la France et ses malheurs défrayaient la chronique, Saint-Exupéry s’exile aux États-Unis. On le dit plutôt abattu et solitaire, ses positions par rapport à la guerre semblent imprécises. Certains croient qu’il est pétainiste, d’autres qu’il serait plutôt gaulliste.
Au début de mai 1942, à l’invitation de son éditeur canadien, Bernard Valiquette, il est de passage dans la province du Québec pour promouvoir son dernier ouvrage « Pilote de guerre ».
A Montréal Saint-Ex établit sa résidence à l’hôtel Windsor, il est invité à donner une causerie conférence à Montréal à l’auditorium de l’école « Le Plateau » (la place des arts de l’époque) et à Québec à la salle Montcalm. Ses conférences sont suivies par des publics nombreux qui venaient l’écouter dans des dispositions extrêmement diverses et complexes.
Dans ses conférences, il aborde plutôt les difficultés d’approvisionnement en vivres, le sauvetage spirituel de la France et le contraste qui existait entre la préparation de la France et celle de l’Allemagne. Selon Saint-Exupéry, la France maintenant désarmée est soumise au chantage de l’ennemi.
Étranger à la chamaille, Saint-Ex, s’attache seulement, mais avec une probité scrupuleuse, à rendre compte du drame dont il sortait à peine. Pour lui, il s’agissait non pas de défendre ou de condamner, mais de rendre témoignage. Avec un luxe infini de détails, il peignait le tableau des misères de l’invasion. Enfin, il s’étonnait comme d’un prodige un peu effrayant et en tout cas absolument inexplicable, que la vie pût pourtant s’organiser dans un tel chaos de souffrances. II ne parlait donc pas de lui, ni de ses aventures. Il parlait surtout de la guerre et des conditions inhumaines qu’elle crée.
Il concluait sur ces mots : « La France, ce peuple, ce monde spirituel, ça ne s’efface pas en cinquante ans ni même en cent ans. Et la preuve, c’est que nous vous retrouvons, vous ici, qui avez les mêmes mœurs et les mêmes coutumes que nous. »
A Québec il est hébergé chez les De Koninck, chez qui Saint-Exupéry réside, dans leur grande maison du 25 de la rue Sainte-Geneviève, dans le Vieux-Québec. Le mathématicien Adrien Pouliot et le chimiste Cyrias Ouellet sont du nombre. L’écrivain délaisse rapidement les conversations intellectuelles entre adultes pour s’asseoir avec les enfants et leur montrer des avions en papier et des dessins.
L’aîné des De Koninck, Thomas, est alors âgé de huit ans et pose constamment des questions à Saint-Exupéry. Pourrait-il avoir servi d’inspiration au Petit Prince, que l’écrivain publiera l’année suivante, en 1943 ?
(source: Cet article est un passage légèrement remanié d’un ouvrage publié en 2012 par Frédéric Smith historien, intitulé « La France appelle votre secours. Québec et la France libre, 1940-1945 » (VLB Éditeur)) et pour en savoir plus cliquez ici.
Puis vient le temps des adieux. Le départ de l’écrivain a déjà été ajourné à deux reprises en raison de problèmes de visa qui l’empêchent de retourner aux États-Unis. Il lui faudra encore cinq semaines d’attente à Montréal avant d’obtenir l’autorisation de traverser la frontière.
L’année suivante, la publication du Petit Prince à New York fait entrer Antoine de Saint-Exupéry dans la légende. Mais l’écrivain est déjà ailleurs. Il souhaite désespérément un ordre de mobilisation qui lui permettrait de rejoindre les Forces aériennes françaises libres, malgré son âge, ses problèmes de santé et le fait qu’il soit en réalité peu doué pour le pilotage. Il reprend finalement du service en Tunisie en avril 1943, effectue quelques missions de reconnaissance puis rejoint son ancien groupe de reconnaissance au printemps 1944.
Le matin du 31 juillet 1944, le pilote-écrivain s’envole de l’aéroport de Poretta en Corse pour une mission cartographique qui permettra de préparer un éventuel débarquement allié en Provence. On ne le reverra plus.
J’ai pris plaisir à lire cet article. Je me demande toutefois comment Saint-Exupéry a-t-il voyagé de New York à Montréal? En train ou en avion ?
Je ne pensais pas trouver la réponse mais dans mes archives j’ai trouvé qu’il était arrivé par avion depuis Washington.
Printemps 2023
« Le petit prince » publié la première fois à New-York en 1943 aurait aujourd’hui 80 ans.
M. Mc Abbie, propriétaire du fameux restaurant du Plateau des années 40: « Au Lutin qui Bouffe », encourageait les artistes à exposer leurs œuvres dans le restaurant. Sans compter les photos des 47 personnalités qu’il affichait dans son entrée et qui ont vraisemblablement dîné « Au Lutin qui bouffe ».
Sur cette carte postale on reconnaîtra d’ailleurs sur la première rangée en 3 ième position Antoine de Saint-Exupéry qui en mai 1942 a séjourné à Montréal à la demande de son éditeur Canadien Bernard Valiquette
Delphine Lacroix