L’achat de la Studebaker
Robert Caron, notre ami, a rassemblé une multitude de souvenirs dans un vaste sac en papier brun. En les brassant avec soin, il les a fait surgir, chacun étant une petite capsule de mémoire qui émerge parfois lors d’une balade dans le vieux quartier ou au creux de notre esprit. Il suffit de les lire les uns après les autres, sans chercher de lien particulier entre eux.
En 1959, mon père a acheté sa première auto neuve chez Alix de la rue Delorimier : une Studebaker Lark. Bonheur total !
Mais cette auto montait péniblement les côtes des Laurentides. Mon père avait trouvé un garage dans une ruelle derrière Laurier, entre Garnier et Fabre, mais cette petite auto ne pouvait pas y entrer car il ne pouvait manœuvrer facilement dans la ruelle trop étroite. C’était un garage muni de portes piano – pas tellement pratique en hiver – conçu originalement pour des Ford Modèle T ! Finalement, il a pris un garage localisé dans la ruelle adjacente à la rue Garnier à $15/mois, eau comprise pour le lavage.
L’achat de cette voiture avait été motivé par un nouveau phénomène : la délocalisation des industries de quartier. La laiterie Borden de la rue Papineau qui ferme et se relocalise en 1959 dans un nouveau bâtiment plus moderne à Ville Saint-Laurent sur la côte de Liesse et dorénavant, pas question d’autobus.
Mon père allait au garage de mon oncle rue de la Roche, près de Mont-Royal, pour l’entretien de sa voiture. Il fut successivement concessionnaire des autos Simca et de Renault. De nos jours, un immeuble résidentiel y occupe l’emplacement.
J’ai compris beaucoup plus tard ce que l’année 1959 avait comporté comme changements : les chevaux et le tramway disparaissent presque en même temps. Les créations de parcs industriels se pointent le nez. Plusieurs exemples : les laiteries comme Borden et Joubert, pour s’agrandir, ne peuvent plus démolir les maisons avoisinantes. Le bruit des bouteilles de verre qui s’entrechoquent devient insupportable, particulièrement en été.
Parvenir à stationner sur la rue Saint-André ou Papineau devient progressivement pour les résidents et les travailleurs un défi quotidien.
Chaque mois, pour un voyage captivant à travers les pages du passé, plongez avec nous dans les souvenirs d’enfance de Robert Caron avec ses prochains articles.
À suivre.
© SHP et Caron Robert, 2024
Illustration :
Index des capsules de mémoire de Robert Caron
Nous utilisions souvent la ruelle au nord de Laurier pour jouer ou aller à l’école. Nous étions surpris d’y voir des maisons et aussi des commerces, comme vous le mentionnez, avec des numéros civiques.
J’ADORE ces récits et les souvenirs qui nous parlent du passé.
Merci Mme Morier
Ces propos m’ont été rapportés par Pierre Alix, le fils de Fernand. Bien qu’il vendait des Studebaker et Sunbeam, monsieur Alix avait un garage Shell qui faisait aussi de la mécanique pour ses clients. Fin des années ’60, s’arrête un petit véhicule pour faire le plein. Pendant que Fernand pompe le carburant, il s’enquiert de la marque. Le client s’avère être un francophone, directeur général de la Canadian Motor Industries qui a les droits d’importation et d’assemblage (en Nouvelle-Écosse) des produits Toyota. Sentant que la marque Studebaker est en voie de disparition, monsieur Alix saute sur l’occasion, se lie d’amitié et devient concessionnaire presque sur le champ. À l’époque, devenir concessionnaire d’une marque qui tentait de s’implanter était aussi facile que cela !Il n’aura fallu que quelques années pour que la vente de produits pétroliers disparaisse et que le commerce s’agrandisse. Quand il a pris la relève de son père, Pierre a tenté de s’agrandir et même déménager mais les règlements municipaux faisaient avorter les plans. Ce n’est que plus récemment que la relocalisation (Papineau et Crémazie) a été possible et le local sur De Lorimier et Augier (sud de Bélanger) est toujours inutilisé. En 1984 et 85, j’ai été commandité par Alix Toyota et remporté deux championnats canadiens en rallye automobile.
Quel beau morceau d’histoire vous nous apportez. Tout est dans tout! Et quand la laiterie Borden de la côte de Liesse a fermé vers 1969-1970, c’est CMI Toyota qui a occupé l’immeuble de la côte de Liesse pendant quelques années. La partie « Réfrigération » a été louée ou vendue à une autre entreprise.
Et en 2002, j’achetais chez Alix un véhicule Toyota
Ce n’est pas d’aujourd’hui que le stationnement et ses problèmes ont commencé.