Haie d’honneur
À l’école primaire Paul-Bruchési, sur le boulevard Saint-Joseph entre les rues Chambord et de Lanaudière, fréquentée par ma petite chérie de la maternelle à la sixième année, il existe une tradition d’accueil et de départ que je n’ai jamais connue ni mes enfants.
Lors de la rentrée, commençant par la porte de la cour la plus éloignée de l’école, tous les anciens élèves regroupés par classes se mettent deux par deux, face à face, joignent les mains très haut pour produire une haie d’honneur jusqu’à la porte arrière. Les bambins de maternelle entrent ensuite dans la cour et passent sous cette longue arcade avant de pénétrer dans le bâtiment et s’installer dans leurs locaux. À la fin de l’année, la haie d’honneur se reforme et invite les sixièmes années à laisser leurs classes pour la dernière fois, sortir dans la cour et serpenter le corridor humain avant de quitter l’école pour de bon, par la même porte. De cette façon, chaque année, les élèves souhaitent la bienvenue aux arrivants et disent adieu aux finissants. Si vous vous posez la question, oui ! les sixièmes doivent se recroqueviller pour passer sous l’arche des maternelles.
En juin 2021, ma petite fille terminait sa sixième année et à cause de la pandémie, on avait prévenu les enfants que la haie d’honneur ne pourrait pas avoir lieu. Elle était très déçue, mais surprise ! Elle a quand même conclu son primaire en beauté grâce à un changement de protocole. Au lieu de joindre les mains, les élèves se tenaient deux par deux, face à face, à une distance respectable, et les sixièmes circulaient dans le couloir ainsi formé sous les applaudissements.
J’étais touchée lorsqu’elle me raconta le processus, les yeux mouillés d’émotion. Je reconnaissais mes gènes de sensibilité. Elle m’avoua que filles et garçons ont versé quelques larmes et ça se comprend. Dommage pour les sixièmes sacrifiées en 2020 !
Dans cette école motivante, les enfants apprennent avec enthousiasme, rient aux éclats, chantent de jolies chansons et bougent selon les activités. Grâce à une atmosphère favorable à l’instruction, ils développent leurs corps et leurs esprits pour passer de la petite enfance à la préadolescence.
Du moins c’est ce que j’observais lorsque plus jeune, j’accompagnais Camille à l’école le matin ou le soir. De plus, elle me relatait ses journées avec détails et conviction. Inutile de dire que j’aimais assister aux spectacles ou concerts, donnés au cours de l’année. Impressionnants et captivants!
Les concerts de Noël et de fin de semestre se déroulaient dans l’église Saint-Stanislas-de-Kostka avoisinant l’école. Toutes les classes participaient en plus d’une excellente chorale d’élèves volontaires dirigée par l’enseignant de musique.
Je garde en mémoire un concert de Noël au cours duquel le chœur des éducateurs entonna sérieusement la chanson Le sentier de neige popularisée par Les Classels. Après quelques strophes, on changea de cadence avec :
Heille ! Fais-tu frette ?
T’es-tu ben juste en coton ouaté ?
Heille ! Y a l’air de faire frette
T’es-tu ben dans ton coton ouaté ?
Ritournelle du groupe Bleu Jeans Bleu qu’on entendait partout à ce moment. Les enfants jubilaient, tapaient des mains, scandaient le rythme. Ambiance du tonnerre !
En 2019, dans le cadre de la semaine de l’histoire, la direction a sollicité des grands-parents pour raconter aux écoliers notre vécu au primaire. Je me suis portée volontaire et on m’a assigné une classe de maternelle et une de première année.
Quelle expérience ! Tous ces visages attentifs, émerveillés et on posait des questions pertinentes ! Faits cocasses : il fallait expliquer ce qu’était une religieuse, ils ne le savaient pas. Ils ne comprenaient pas l’absence de dîners sur place ni de service de garde parce qu’à l’époque les mamans ne travaillaient pas. Ils ignoraient aussi que peu de livres et de bibliothèques étaient disponibles pour la lecture.
Chaque année, la reprise des classes en septembre annonçait une belle aventure pour moi. J’éprouvais le même sentiment lorsque Camille commençait une nouvelle année à l’école Paul Bruchési dans un environnement plus décontracté et convivial que celui que j’ai connu.
© SHP et Michèle Olivier, 2023.
Index des capsules de mémoire de Michèle Olivier
Merci monsieur Dugas pour la photo.
J’ai cherché, mais sans succès. Je n’avais que la description de ma petite fille pour écrire le texte.
Il serait intéressant de savoir quand cette tradition de la haie d’honneur a commencé?
Merci pour ce commentaire!
J’ai fait mon entrée au primaire en 1958 à l’école Paul-Bruchési.
Pas de haie d’honneur à ce moment…cela m’aurait peut-être rassurée !
Une belle tradition qui a, malheureusement, commencé après la fin des études de mes trois enfants à cette école. Je garde un très bon souvenir de Paul-Bruchési, en raison de l’excellence de son enseignement.
Superbe article Michèle!
J’ai fréquenté cette école de 1960 à 1963. Je ne me souviens pas de cette arcade. S’il y avait quelqu’un qui pourrait me rafraîchir la mémoire…
J’apprécie beaucoup car je viens du Plateau. Vous devez parler de l’abattoir qui était sur Iberville et Mont-Royal où est présentement le Journal de Montréal.
Merci pour ce rappel mais comme promis nous aborderons les calligraphies éphémères aujourd’hui effacées.:-(
Et alors nous aborderons ce sujet.
Nous recherchons
Il nous ferait plaisir de retrouver une photo d’une de ces haies d’honneur que l’on pourrait publier sur ce blogue.
La photo est extraite d’une vidéo réalisée le 23 juin 2014 lors de la haie d’honneur dans la cour de l’école Paul-Bruchési. Mon fils Yannick est parmi les finissants.